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Auriane Velten nous parle de Cimqa

À l’occasion de la sortie prochaine de Cimqa, Auriane Velten revient sur l’écriture de ce nouveau roman de science-fiction, profondément humain, qui interroge nos rapports à l’imagination et à l’art.

Votre nouveau roman, Cimqa, paraît prochainement. Comment celui-ci est-il né ? D’un constat ?

Comme la plupart de mes écrits, Cimqa a plusieurs sources. Il vient donc en partie d’une rêverie, d’un fantasme : celui de pouvoir « facilement » montrer à autrui tout ce que j’imagine. Il y a une forme de frustration avec l’écriture, qui – peut-être par nature de ce médium, peut-être à cause de mes limitations – ne permet pas ce rendu exact par les mots de ce que j’ai en tête.
Après, il y a aussi ce qui est à la fois un constat et un sentiment : le constat que la société (hétéro-patriarcale-capitaliste) s’empare de tout ce qui est beau, le retourne à son profit, et le rend laid. Et le sentiment d’être coincé·e.
Et enfin d’une envie : de montrer des trajectoires de gens qui s’aident, s’aiment, et amorcent ce qui leur est possible en termes de révolution.

On y suit les parcours de Sara et Sarah, deux personnages dont les destins vont se retrouver liés. Peut-on les voir comme les deux faces d’une même pièce ? Des reflets de vous-même ?

Des reflets de moi-même, sûrement pas, ou alors ni plus ni moins que n’importe quels personnages. Il serait idiot de dire qu’il n’y a pas un peu d’un·e auteurice dans chacun de ses personnages. Nous écrivons à partir d’où et de qui nous sommes ; écrire une altérité absolue me semble être une impossibilité (même si tenter de l’atteindre est très enthousiasmant !)
Sara et Sarah ne sont que les deux personnages qui sont nés avec l’histoire. Elles étaient les deux (quatre, si on ajoute Ada et Eva) qui pouvaient l’habiter et la mettre en mouvement de la façon que je souhaitais.

L’art, l’imagination… Ce sont des sujets qui vous tiennent particulièrement à cœur, pourquoi ? Qu’est-ce que cela représente pour vous ?

C’est mon centre – vital et de gravité. Je me suis toujours réfugiée dans l’imaginaire, et j’ai toujours voulu trouver une manière de le vivre plus et ensemble – pour cela aller vers l’art m’a semblé naturel.
J’ai dit « réfugiée », parce que l’imaginaire a pu et peut encore être cela : une fuite. Mais la fuite n’a rien de lâche, elle peut consister à faire sécession, mais aussi à aller voir ailleurs, à se gorger d’autrement, et à revenir avec des envies de changement.
Donc, à titre personnel, si vous me retirez l’imagination et l’écriture, je pense que je m’effondre intérieurement en une semaine.
Et de façon sociale, je pense que l’art et l’imagination (Mais aussi la recherche et la science – entre autres choses) sont des moyens de faire respirer l’humanité, et d’envisager des autrement, ou la seule possibilité d’existence d’un autrement.

Un roman qui fait réfléchir, mais également rêver. Comment avez-vous construit la Cimqa ?

Dans le sang et les larmes ?
À vrai dire le livre qui est paru est assez différent de celui que j’avais construit à l’origine, qui comptait trois lignes narratives. Mais sa complexité structurelle lui faisait perdre en compréhension.
À l’origine, je savais que je voulais Sarah, Sara, et les rêves. Je savais quel serait leur parcours à chacune. À partir de là, j’ai construit… Un tableau Excel, en intercalant chaque chapitre, pour que leur succession soit logique et ne pas divulguer dans une ligne narrative des choses que je devais encore taire pour l’autre.
Et à la réécriture, j’ai supprimé une des trois lignes et entièrement redécoupé et réagencé une autre : ce fut… Compliqué.
Mais ces conseils étaient bons, et le résultat final est bien meilleur que la version originale – ou du moins, rend bien plus justice à mes personnages.

Un mot pour la fin.
Auriez-vous une anecdote à nous confier au sujet de l’écriture de ce nouveau récit ?

Je me souviens avoir appelé une amie au téléphone, pour lui hurler que je n’y arrivais pas – je m’acharnais sur un passage extrêmement important depuis deux heures. Une vingtaine de lignes que je ne parvenais pas à écrire comme je le voulais, et sans lesquelles le livre tout entier ne fonctionnait pas. Mon amie m’a calmement dit de sortir, d’aller marcher et de retenter le lendemain. Ce que j’ai fait. Le lendemain, la scène s’est écrite presque toute seule.
Scène que par la suite, j’ai entièrement supprimé. Finalement, elle n’était pas si importante.

Cimqa est à retrouver en librairie et sur notre site dès le 4 octobre.

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